Abbé Crestey

 

L'ABBE CRESTEY

 

 

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Le Pasteur Fouace

 

Pierre Crestey

(1622 - 1703)

 

Pierre Crestey naquit à Trun le 17 novembre 1622, fils de Jean Crestey et de Robine Boscher, demeurant dans l'actuelle rue Beghin.

Sa famille très pieuse, voulut faire de son aîné un homme de robe: procureur ou avocat. Elle l'envoya étudier le droit et la procédure chez un avocat à Sées. Après deux ans de stage, Pierre Crestey renonça, dégoûté "de voir des avocats démonter autant d'argent aux pauvres qu'aux riches". Il partit à Caen étudier la philosophie et la théologie chez les Jésuites. Sous-diacre, diacre, il était fait prêtre à Rouen en 1649 par Jean-Pierre Camus, évêque de Belley, ami de Saint François de Sales.

Revenu à Trun, vicaire de Claude Bonnet, il trouva le bourg en proie au libertinage et au calvinisme. Chargé de l'hôpital, il y fonda une école de filles, remet un peu d'ordre à la Maison-Dieu "dont le revenu était assez considérable et chacun en profitait au préjudice des pauvres qui y demeuraient".

A Trun , il fit la classe aux enfants, établit la confrérie du Rosaire, et chargeat son frère François de s'occuper de l' hôpital.

En 1654, Pierre Crestey va à Paris sur les conseils de Jean Eudes avec lequel il est en relation. Il consulte Olier, Bourdoise et Vincent, fait une retraite à la Maison de Saint-Lazare.

Pierre Crestey est un disciple de Monsieur Vincent ; comme lui, il pense à l'instruction des futurs prêtres, et aux pauvres. 

1661 - 1678  : Curé du Menil-Imbert

1661 : Le curé du Menil-Imbert, qui venait de mourir, avait mené une vie très scandaleuse dans sa paroisse et les mauvais exemples de ses actions avaient été contagieux pour la plupart de ses paroissiens, qui vivaient dans un grand dérèglement. L'église était dans un état lamentable, c'était plutôt une grange. Le revenu de la cure ne s'élevait qu'à 150 livres par an. La population catholique était sans mœurs et mal instruite.

Un grand nombre d'habitants, 80 ans plutôt , avait adhéré à l'hérésie protestante. Tout prés de l'église , à cent mètres environ , les huguenots avaient fait bâtir une prêche contrairement aux Édits du Roi .

Rien de bien attrayant pour un nouveau prêtre. La Miséricorde infinie de Dieu avait résolu d'en faire un centre de vie catholique.

Le patron de la paroisse du Menil-Imbert : Monsieur de la Haye , Seigneur des lieux, gémissait depuis longtemps des désordres du pasteur et de ses paroissiens.  Il s'en était entretenu avec l'Abbé Crestey. Madame de la Haye pria son mari d'offrir la succession à l'Abbé Crestey qui avait éduqué leurs enfants et dont elle connaissait le mérite.

Pierre Crestey refusa d'abord à plusieurs reprises. Enfin sur les conseils d'Enguerard le Chevalier, son directeur de conscience , futur supérieur du séminaire de Séez , il accepta la cure par pure obéissance .

C'était en 1661, le Menil-Imbert faisait partie du doyenné de Livarot, mais sera rattaché à Séez lors de la constitution civil du Clergé .

Des méthodes efficaces 

M. Crestey, entrant au Menil-Imbert, commença par régler sa maison sur le même pied qu'elle l'avait été à Trun ; c'est-à-dire qu'il faisait faire avec lui, tous les matins, la méditation à ses prêtres, la lecture d'un bon livre à table, la prière du soir en commun et, tous les vendredis au soir, une conférence où l'on traitait tantôt d'une vertu propre aux ecclésiastiques, tantôt des défauts qui règnent ordinairement parmi eux ou parmi les peuples et les écoliers ; puis on parlait des moyens propres à remédier aux maux qu'on avait remarqués.

Là, comme à Trun, il établit d'abord une pension et un collège et chercha les moyens de sanctifier ses paroissiens, ce qui était sa principale obligation. Pour cet effet, il choisit deux excellents vicaires et quatre régents capables d'enseigner les humanités, et les obligea de venir demeurer avec lui dans son presbytère, pour y vivre en communauté. Cinq autres prêtres se joignirent à eux, en sorte qu'ils étaient au nombre de douze, desquels il y en avait cinq ou six, tous les jours, occupés à entendre les confessions et à instruire les habitants de sa paroisse et les peuples d'alentour qui y venaient en foule, tant ils étaient altérés de la parole de Dieu. On peut dire que, pendant les deux premières années, on fit au Menil-Imbert une mission continuelle. Le collège donc un véritable séminaire avec le concours de nouveaux prêtres, l’un pour la philosophie, l’autre pour la théologie dogmatique. La vie exemplaire du curé et de ses prêtres fut pour tous les paroissiens un livre toujours ouvert, où ils apprenaient leurs devoirs d'une manière même plus sensible que dans leurs sermons. 

Outre les instructions que M. Crestey et ses prêtres faisaient au Menil-Imbert, il appelait encore de temps en temps des ouvriers évangéliques de Caen, de Lisieux et d'Argentan, pour soutenir et augmenter le bien qu'il avait commencé et réveiller le goût et l'attention des peuples, qui s'ennuient souvent d'entendre toujours les mêmes prédicateurs, et aussi pour leur laisser la facilité d'ouvrir leur cœur avec plus de liberté à des confesseurs inconnus et éloignés de leurs villages, qu'ils n'avaient jamais vus et qu'ils ne reverraient jamais. Car la délicatesse du cœur humain est si grande, que souvent les peuples n'osent dire leurs péchés à leurs propres curés ou à leurs vicaires, parce qu'ils en sont connus, ou que, les connaissant pour gens réguliers et les ayant entendus parler avec beaucoup de force et de zèle contre les vices dont ils sont coupables, ils craignent d'en être traités avec trop de sévérité.

Avant de rebâtir , il faut déblayer le terrain.

Ce très saint Prêtre commença son apostolat en prêchant la fidélité à l'église romaine, en secourant les pauvres, en luttant contre la division. Ne réussissant pas il entreprit une action en justice contre les protestants.  

Monsieur Pierre Crestey, en toute légalité présenta au tribunal royal d'Alençon , une requête tendant à la démolition de la Prêche. L'affaire fut évoquée en Conseil d ' État où le demandeur, par Arrêt de la Cour du 25 avril 1665, eut gain de cause. Les protestants furent condamnés à démolir le temple, avec interdiction de reconstruire,  outre, à verser au curé, à titre d’indemnité, une somme de 400 livres, aux frais et dépens.  

C'est alors qu'il fit le vœu de bâtir un asile pour pauvres si tous les Huguenots se convertissaient.  

Après la démolition, Monsieur Pierre Crestey acheta le terrain et à l'emplacement fit planter solennellement une grande Croix qui a disparu au début du XIX ° siècle. Les premiers dimanches de chaque mois il y conduisait ses fidèles en procession. Tous les ans , à la fête Dieu , il y faisait dresser un reposoir .

L'Abbé combattit vaillamment les protestants qu'au bout de 2 ans sa paroisse comptait plus de catholiques que de protestants.

Il établit un collège au Menil-Imbert.

Libre désormais de son action, l'Abbé Crestey établit dans l'enceinte de son presbytère, situé à l'ouest de l'église, un collège, où des écoliers de Trun finrent le rejoindre. Les classes étaient faite de bois et de terre et couvertes en chaume ; les élèves étaient soit pensionnaires, soit externes, logeant chez d'honnêtes gens de la paroisse. Les surveillants , nommés par l'Abbé Crestey, veillaient à l'observation du règlement dans l'école comme dans les maisons où vivaient les externes.

Comme à Trun , les deux grandes préoccupations, étaient de mettre à l'abri de tout danger ses élèves et de faire fleurir la Piété envers la Sainte Vierge. Monsieur l'Abbé s'associa d'abord 2 vicaires et par la suite, d’autres ecclésiastiques chargés de la prédication, des confessions et des autres oeuvres sacerdotales.

Pendant 2 ans, au Menil-Imbert, c'était une mission continuelle ; on venait s'instruire ou s'édifier de toute la région ; de temps en temps des missionnaires d'Argentan, Caen ou Lisieux étaient appelés par l'Abbé afin d'attirer plus encore la population du fait de la nouveauté, et d'entendre les confessions.

Diverses confréries : Saint Sacrement, Rosaire, scapulaire siégèrent dans l'église paroissiale.

Le presbytère était tout à la fois : collège, séminaire, lieu de pèlerinage et communauté ecclésiastique. Les douze prêtres qui y vivaient ensemble instruisaient la paroisse tant par l'exemple de leur vertu que par leur prédication.

La réputation de l' Abbé Crestey ne pouvait demeurer dans d'étroites limites, les Évêques de Lisieux, Séez ou Bayeux avaient pour lui assez d'estime pour lui confier l'éducation de nombreux séminaristes où étaient enseigné : philosophie , théologie et préparation à recevoir les saints ordres.

Le Menil-Imbert devint célèbre en Normandie. 

Il établit un hôpital pour les pauvres à Vimoutiers.

La misère de Vimoutiers étonna le curé du Mesnil Imbert. En 1676, avec les sommes reçues pour le procès qu'il avait gagné avec dépens contre les huguenots du Menil-Imbert, il achetat une maison à Vimoutiers, pour y loger les pauvres malades du lieu et des environs, fit venir deux soeurs hospitalières de Sées, et construisit un hôpital à Vimoutiers de 50 lits. 

La renommée de Pierre Crestey dépassait les limites du diocèse. 

On lui envoyait des élèves de partout au Menil Imbert. 

En accord avec l'abbé du Val Richer, il fut prié de donner des règles de vie au couvent des religieuses de Bernay.

Il établit une conférence ecclésiastique tous les mois au Menil-Imbert.

M. Crestey, qui avait fort à cœur l'avancement des prêtres dans la science et dans la perfection de leur état, n'omettait rien de tout ce qui pouvait y contribuer. Le grand nombre de régents et de prêtres qui travaillaient à sa paroisse et dans son collège, ceux des autres paroisses d'alentour qui venaient le voir et conférer avec lui sur leurs obligations, lui firent naître la pensée d'établir une conférence chaque mois dans sa maison, afin de seconder l'ardeur qu'il voyait en eux pour s'instruire et pour se perfectionner dans leur profession.

1678 : M. Crestey est nommé curé de Barenton, dans le diocèse d'Avranches. 

Pierre Crestey était depuis 18 ans au Mesnil Imbert quand Madame de Ducey lui offrit la cure de Barenton conseillée par Monseigneur de Froullay de Tessé, évêque d'Avranches. Son directeur de conscience, Monsieur de la Vigne, curé de Saint Pierre de Caen, le pressa d'accepter. Après beaucoup d'hésitions, Pierre Crestey quitta le Mesnil Imbert, confia la surveillance de l'hôpital de Vimoutiers à son frère François alors curé de Trun. Il emmena avec lui les huit professeurs de son séminaire. 

Regretté de tout le monde, pour consoler ses chers paroissiens, il fit quatre choses également édifiantes et dignes d'un saint pasteur : la première fut de distribuer des aumônes abondantes aux pauvres du Menil-Imbert; la seconde, de dire et faire célébrer quantité de messes pour demander à Dieu un digne successeur ; la troisième, d'y laisser d'excellents vicaires; la quatrième, d'aller prendre congé de Mgr l'Évêque de Lisieux, et lui demander pardon des fautes qu'il avait faites en son diocèse

Pierre Crestey s'y dépensa sans compter. Fondation d'une école de filles, fondation d'un collège, confréries, mission et prédication dans le diocèse. Démuni d'argent, mais "comptant sur les trésors de la Providence", il fonda un hôpital à Barenton. L'évêque d'Avranches était alors Daniel Huet, l'érudit, le latiniste, membre de l'Académie Française, ancien condisciple de Pierre Crestey à Caen; en 1692, il aide Crestey pour l'hôpital, lui donne de l'argent, intervient auprès du Duc d'Orléans frère de Louis XIV pour obtenir des lettres patentes. L'hôpital fut bâti, deux religieuses de Vimoutiers s'y installent, on y construisit une chapelle, etc.

La renommée de bonté, de charité de Pierre Crestey s'étendit en Normandie. De partout on lui demandait des conseils, des règles de vie, des directions spirituelles, Supérieur des Bénédictines de Vire, des Carmélites de Pont-Audemer, il les visite deux fois par an, prêche des retraites, aide à fonder l'hôpital de Bernay, etc. Il a la réputation d'un saint et on le compare à Saint Vincent de Paul.

Il mourut à Barenton en 1703. 

Document rédigé avec le concours de M. Joseph Benoist de Vimoutiers, membre de notre association.

 

Biographie établie à partir des documents suivants

MESSIRE CRESTEY » écrit manuscrit de l’abbé GRANDET commenté par l’abbé BLOUET

"Les de Corday au Pays d’Argentan" de Xavier Rousseau 

Carillons de Vimoutiers de 1910

Histoire de Vimoutiers par l'Abbé Gratry, vicaire à Vimoutiers

Histoire de Vimoutiers par Alfred Brion ( 1869)

Histoire de l'Hospice par A Pernelle

Bulletin trimestriel du Billot - Mars 2000 : Démilition du temple protestant du Mesnil Imbert (J. Manoeuvrier)  

R. Bonnet de la Tour : trun.free.fr/pierre_crestey.htm

 

P S :  Nous recherchons des informations complémentaires sur l'Abbé Crestey et les émigrés du Ménil Imbert...

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